A l’aube de la Deuxième République, Paris est une ville labyrinthique et insalubre, propice aux épidémies de choléra. Dès son arrivée à la tête du pays, le tout fraichement nommé Président de la Deuxième République, Napoléon III, souhaite moderniser la capitale. S’inspirant du Londres de l’époque, qui depuis la Révolution Industrielle s’est métamorphosé, le futur empereur charge le préfet de la Seine (l’actuel Paris), de procéder à de grands travaux d’aménagement, s’axant sur trois objectifs : aérer, unifier, et embellir la ville.

 

UNE POLITIQUE VOLONTARISTE POUR TRANSFORMER LA VILLE RAPIDEMENT

C’est ainsi qu’Haussmann entreprit un travail de deux décennies, qui resplendit encore de par le monde plus d’un siècle plus tard.

Dans le but d’aérer et de circuler plus facilement, les rues étroites encore présentes au début du 19ème siècle furent élargies, remplacées par de grandes avenues, ces dernières débouchant sur des monuments emblématiques : l’Opéra Garnier (achevé à la fin du Second Empire), les Halles (lieu d’approvisionnement pour toute la ville), la Gare du Nord (symbole des nouvelles avancées technologiques, et moyen d’acheminement d’un capital grandissant), …

Au-delà de l’urbanisme, l’architecture dans ses moindres détails est fondamentalement modifiée. Les immeubles haussmanniens voient le jour, sous l’œil attentif de leur créateur, et la main de nombreux architectes qui le représente. On choisit les modèles de chaque détail dans des catalogues, le cahier des charges de la ville imposant une certaine homogénéité. Corniches, balcons et façades, tout doit s’aligner. Même le mobilier urbain y passe ! Lampadaires, bancs, kiosques, … Paris devient une capitale moderne.

Mais le principal changement, bien que méconnu, réside dans l’élan hygiéniste porté par Haussmann. Des centaines de kilomètres de canalisations d’eau et d’égouts sont creusés, deux grands réservoirs sont construits, dont l’un est le plus grand du monde à l’époque, dans le but d’alimenter les habitants en eau, même dans les hauteurs …

La capitale en pleine expansion devient plus spacieuse, plus hygiénique, et s’ouvre au monde.

L’ENVERS DU DÉCOR ….   Cependant, ces travaux d’aménagement ne se font pas sans problème. S’étalant sur plus de 17 ans et employant plusieurs dizaines de milliers d’ouvriers, les chantiers prennent de l’ampleur, tant temporellement que géographiquement.

Les finances sont également un point problématique : Haussmann eu beau essayer de réduire les coûts, en réutilisant les matériaux des maisons détruites, ainsi qu’en offrant peu de compensation financière aux habitants, il dû tout de même emprunter plus d’un milliard de francs et endetter Paris pour 50 ans. Les objectifs sécuritaires du projet (empêcher les barricades à l’aide de larges avenues, simplifier le mouvement des troupes) n’étant pas dans le projet initial, il semblerait qu’Haussmann ai utilisé cet argument pour se voir accorder deux nouveaux emprunts. La bourgeoisie craignant une nouvelle révolution, elle fût en effet particulièrement à l’écoute de ces propos.

Outre les finances, l’opinion publique devint de moins en moins favorable au projet. En effet, les travaux perdurant, la poussière et le bruit se faisant constants, les nombreuses personnes déplacées réclament réparation. 20 000 maisons sont détruites, soit plus de la moitié de la surface de la capitale. Avec une nouvelle loi d’expropriation pour utilité publique et hygiène, Haussmann contraint la classe ouvrière de quitter le centre-ville, devenu trop cher, pour la périphérie. Le Bidonville de Montmartre est ainsi créé.

Suite à ces nombreuses spéculations immobilières, le baron tombe en disgrâce en 1870, juste avant la chute du Second Empire, et de son empereur par la même occasion. La guerre Franco-Prussienne qui suivra, avec ses dégâts et ses dettes à payer, mis fin aux grands projets portés par ce duo.

UNE INFLUENCE AU-DELÀ DES ÉPOQUES ET DES CONTINENTS

Bien que décrié sur la fin, le chantier inspire. Outre les nombreuses villes de France où l’on construisit sur le même modèle, des architectes et urbanistes internationaux, comme Hobrecht et Burnham s’inspirèrent des tracés parisiens, bien que ces travaux de très grande ampleur ne fussent pas ou peu réalisés. Ils projetèrent sur l’exemple parisien les préceptes d’Haussmann avec ses larges avenues, ses parcs, ses réseaux d’eau et de gaz. Devenant synonyme de modernité et de progrès, le plan d’urbanisme de Haussmann reste encore aujourd’hui l’un des plus grands chantiers du XIXème siècle.

1909 Plan de Chicago par Daniel Burnhanm
1909 Plan de Chicago par Daniel Burnhanm

De nos jours, plus de la moitié des immeubles parisiens est d’architecture haussmannienne, et l’organisation entière de Paris réside sur le travail acharné, bien que critiquable sous bien des aspects, d’un duo aux idées novatrices. En moins de 20 ans, ils modifièrent fondamentalement la capitale, laissant des traces au-delà des âges, et s’inscrivant dans le grand livre de l’Architecture française.

BIBLIOGRAPHIE

Article : 

Haussmann ou le triomphe (toujours actuel) de la pensée bourgeoise de la ville (2019): https://paris-luttes.info/haussmann-ou-le-triomphe-toujours-12332 

Commentaire du livre: Haussmann, de la modernité à la révolution, Métropolitiques (2013) :  https://metropolitiques.eu/IMG/pdf/met-huriot2.pdf 

Document de recherche :

Bernard Marchand (2011) Le financement des travaux d’Haussmann : un exemple pour les pays émergents ?  :  https://halshs.archives-ouvertes.fr/halshs-00583457/document 

 

Podcast :

Jean des Cars (2020)  Au cœur de l’histoire – Haussmann, le préfet qui a sauvé Paris: www.youtube.com/watch?v=2Sz4TzrAq7s 

 

Livres :

David Harvey (2012) Paris, capitale de la modernité, Paris : les Prairies ordinaires, 529p  (nécessite un abonnement aux bibliothèques de prêt de Paris) 

Marchand, B (1993) Paris, histoire d’une ville, XIX°-XX° siècles, Le Seuil, 438 p. Disponible à la Bibliothèque d’architecture contemporaine de Paris. Son accès est réservé (sur justificatif) aux professionnels, enseignants, chercheurs, doctorants et étudiants du domaine ainsi qu’aux personnes justifiant d’un besoin d’utiliser les collections.

Louis Lazare (1870) Les quartiers pauvres de Paris : le 20e arrondissement, Etude Municipale 254p. Disponible sur internet: https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k6489749t.texteImage

 Tous ces livres sont disponible à la vente.

Documentaire et reportage:

Le pari d’Haussmann (2017): www.youtube.com/watch?v=Q1LV8jQKOVA 

C’est pas sorcier – Paris lumière (1999): www.youtube.com/watch?v=H6AhK_GcNn4 

Texte coécrit: Cyrielle MAUBERT & Antoine KIENTZ

Auteur/Autrice

Vous pouvez également aimer :

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *