Récemment le gouvernement a décidé de lutter contre l’islamo-gauchisme sans vraiment savoir ce que c’était ! En revanche une catégorie de personnes, celles des historiens de twitter faisant de la vulgarisation, continue de sévir sur les réseaux ! Ils prétendent tous partager leur passion pour l’histoire auprès du plus grand nombre. Si une chose les unit parfaitement, c’est la volonté d’obtenir le plus de vues pour se faire connaître. On trouve ainsi en tête notre cher NotaBene, chaîne youtube de Benjamin Brillaud. Avec son plus d’un million d’abonnés, il obtient régulièrement le financement du CNC et le soutien d’Arte ou d’autres institutions. Ce youtubeur, ami d’Usul, fait avant tout de la politique et ne s’en cache pas comme il l’explique d’ailleurs dans cet article.

Mais la politique a des limites en histoire : doit-on obligatoirement prendre le passé pour comprendre le présent ?

Le sujet est complexe et mériterait un article à part entière mais ce n’est pas dans des vidéos de vingt minutes que l’on peut expliquer les changements qui ont forgé notre époque. Deux visions semblent se dégager de la quête historique actuellement: ceux qui continuent de prendre les figures et les grands évènements et ceux qui tentent de donner une vision plus globale à l’histoire de France. Deux visions qui ne s’affrontent pas complètement puisque, à mon avis, elles sont complémentaires et se rejoignent souvent dans les médias.

Revenons à Nota Bene qui a compris que les spectateurs aimaient entendre parler d’histoire. On peut y voir simplement le pendant de Lorànt Deutsch et de Stéphane Bern: l’histoire fait vendre. Il y a quelques années, des historiens avaient attaqué ces deux-là comme faisant de la politique réactionnaire ! Mais je voudrais d’abord y voir les deux faces d’une même pièce. Le lancement par Nota Bene de sa chaîne sur abonnement  me pousse encore plus à faire la comparaison avec Stephane Bern sur le service public.

Nota Bene remplit ses vidéos de publicités et de sponsors (qui influent souvent sur son contenu) jusqu’à des liens affiliés à la Fnac ou Amazon lorsqu’il donne ses sources ! D’ailleurs prenons l’exemple des sources lors de sa vidéo sur Kieffer et son commando : il a utilisé des livres sur le front de l’Est (le Normandie-Niemen) ou sur des unités de la légion alors qu’on s’attendait à une bibliographie moindre mais plus centrée. C’est souvent le cas avec lui, on voit des vidéos qu’il a fait lui-même à partir de tout et n’importe quoi et d’autres vidéos faits par des gens plus sérieux.

Il y a peu de temps Valeurs actuelles a osé prendre des morceaux de vidéos de sa chaîne Youtube, et au lieu de critiquer le fond, Nota Bene n’a fait que les insulter et critiquer la forme comme on le voit dans ce résumé de France 3

Mais que veut-il nous dire ? Quelle est sa vision de l’histoire? Nota Bene fait de l’histoire comme Patrick Boucheron, rien de plus. C’est l’histoire reconnue comme celle devant être mise en avant dans les médias ces dernier temps.

Venons en maintenant à son amie Manon Bril de la chaîne C’est une autre histoire. Docteur en histoire contemporaine, Manon Champier est une bonne amie d’Usul, elle aussi (le monde est petit dis donc!). Elle fait maintenant des vidéos avec Cyprien car elle semble viser les jeunes, voire les très jeunes, qui sont majoritaires sur Youtube. Elle s’est fait connaître pour sa vidéo d’entre deux tours en 2017 où elle appelait à voter Emmanuel Macron. Mais elle répondra tout de même qu’elle ne fait pas de politique et qu’elle n’est pas élue. Mais alors pourquoi a-t-elle appelé à voter Macron ? Est-ce que tous les citoyens ont fait des vidéos à ce sujet ?

Dernièrement, elle a fait la polémique avec sa vidéo issue de TikTok sur le droit de vote des femmes où, à partir d’une liste trouvée on ne sait où, elle critique la France comme étant l’une des dernières nations dans le monde à attribuer ce droit. Mais sa vidéo, qui mélange plusieurs choses et est remplie d’erreurs, est symptomatique de la production de ces vidéastes: peut-on faire bien quand on fait vite ?

Un de ceux qui représente le mieux cette catégorie de faiseurs rapides est La Folle histoire : il publie deux à trois vidéos par mois. Ses vidéos ne sont qu’un condensé de pages d’encyclopédie en ligne. Il aime parler de l’homme fort ou à l’histoire incroyable.

On arrive enfin à Charlie Danger avec les Revues du Monde qui a commencé par de la démystification de théories du complot et de mythes contemporains (ce qui permet de faire des vues très rapidement). Elle est devenue la spécialiste de sujets à la mode (comme Manon Brill, avec laquelle elle est aussi proche, sur le sexe et le féminisme par exemple). Ses dernières vidéos sont un parfait exemple que la vulgarisation mène à faire du contenu sans intérêt. Mais cela fait cliquer…

Je ne reviendrai pas sur Greg Toussaint qui fait depuis peu quelques vidéos histoires (comme celle sur Jeanne d’Arc) car il reste avant tout un comique politique ou sur Julien Rochedy, cela serait tirer sur l’ambulance. En revanche, revenons un peu sur TéléCrayon, ami d’Un Monde riant cette fois, qui fait de l’histoire-géographie avec des dessins rigolos et des drapeaux. Il ne se cache pas de puiser essentiellement ses connaissances sur Wikipédia qui en devient parfois l’unique source en descriptif. Il y a aussi les comptes Twitter d’histoire comme Bouteflikov qui fait dans l’anecdote, ou Les Anecdotes de l’historien qui fait dans le contenu religieux. C’est ici l’une des choses les plus importantes que ce twittos rejette: les sources et l’historiographie. Or, c’est l’un des piliers de tout travail en histoire: pour faire une bonne vidéo, il faut toujours expliquer d’où viennent les informations (d’où l’importance de la bibliographie). Les vidéos d’Herodotcom ou de Thomas Laurent le montrent parfaitement: ils expliquent toujours d’où viennent les informations, quitte à perdre un peu de rythme. Ils ne relèguent pas les sources tout en bas de la description, permettant à certains (suivez mon regard insistant) de placer des partenariats et autre publicités avant de pouvoir y accéder. Et enfin utiliser des encyclopédies (Wikipédia, Universalis…) convient pour une première approche mais ne peut suffire car l’encyclopédie n’est pas un travail historique en soit. Soit, Wikipédia est un outil important de nos jours mais cette encyclopédie participative a de nombreux biais. Elle reste néanmoins intéressante pour les dates et les principaux événements, mais dès qu’il s’agit d’analyse, elle montre très rapidement ses limites.

Conclusion :

Ces youtubeurs font à la fois de la politique (ce qui est plus ou moins dit ou déguisé) mais surtout veulent conserver un auditoire qui leur permet d’avoir un revenu. Youtube n’est pas une bonne plateforme car ce n’est pas la durée de visionnage ou le contenu qui constitue leur modèle économique mais celui du clic. Plus il y a de clics, plus tu génères de l’argent. Cela va à l’encontre de la vulgarisation et encore plus de la science car les informations sont noyées dans les placements de produits. Car oui on oublie souvent que l’histoire (sans grand H, elle n’en a pas besoin) est une science avec une méthode que certains youtubeurs ne semblent plus vouloir utiliser contrairement à d’autres, seulement orientés vers le « putaclic ».

Auteur/Autrice

À propos de l’auteur

Docteur en histoire de l'art.

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